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Un soir, un livre 2017

 Activité gratuite ouverte à tous.

On discute d'un livre choisi d'un commun accord auparavant.
On peut même venir juste pour attraper le désir de lire...
Pour s'informer, participer, organiser, accueillir...
Infos : Jeanne Bem : jeannebem@yahoo.fr 

 

Mardi 21 novembre 2017

Le héros de « Sous le ciel qui brûle », Tuân, est un solitaire, il est comme un enfant dont la vie s'est figée à la mort de ses parents, il n'a plus grandi, il n'en a pas fait le deuil. A la différence d’Eliane, son amie française qui essaie de surmonter la mort de son mari. C'est un roman de l'exil et du souvenir. Il est jugé différent du premier, "L’Ombre douce", moins tragique à cause de la note d'espoir de la fin. Le point de vue est exclusivement celui du personnage masculin. On apprend plus de choses sur le Viêt Nam, et on retrouve avec plaisir la double culture française/vietnamienne. La littérature, Nerval, Rimbaud, se mêle à la vie. Les forêts autour de Chantilly fusionnent avec l’Annam de l’enfance. Les poésies incluses sont appréciées, mais parfois jugées mièvres. Le titre peut desservir le roman : il correspond à un épisode particulièrement violent et décisif (l’offensive du Têt de 1968), mais il ne rend pas compte de la tonalité générale, qui est si délicate, évocatrice d’une douceur de vivre à jamais perdue, avec des portraits de fleurs et des paysages magnifiques qui font penser aux peintres préraphaélites autant qu’aux estampes de l’art oriental.
La visite de Hoai Huong Nguyen d'il y a quelques années nous a laissé un grand souvenir et son deuxième roman ne nous déçoit pas.

   
Lundi 16 octobre
Nous étions onze hier chez Nicole Neyrat - merci pour son charmant accueil! La discussion portait donc sur le dernier livre de Marie Darrieussecq, "Notre vie dans les forêts".
Rarement on aura vu des réactions aussi contrastées: quatre ou cinq (en comptant les absents qui ont donné leur avis) ont aimé ce roman, d'autres avaient un avis mitigé, et plusieurs, présents ou absents, étaient franchement hostiles.

On a dit que Darrieussecq n'avait rien inventé, que son style était relâché, qu'on n'arrivait pas à s'intéresser à ce récit. D'autres ont pris sa défense, car ces arguments peuvent être retournés: elle a inventé la version 2017 de "1984", une dystopie pour notre temps, conçue esthétiquement d'une façon forcément différente de celle d'Orwell qui avait publié son roman en 1948. (dystopie: monde imaginaire à l'opposé de l'utopie)

Le style est presque oral et marque un peu de confusion dans l'esprit de la narratrice. Elle écrit vite (comme la romancière elle-même a écrit vite), elle est dans l'urgence et dans la précarité, en fait elle va mourir très bientôt, et cette angoisse est suggérée dès les deux premières pages: le récit est en flash back, mais il faut le remarquer et le garder en mémoire.

On a dit qu'il n'y avait pas d'émotion: ce n'est pas le but de la romancière, elle est dans le récit sobre d'un état du monde qui est terrible, et puis pour garder le suspense, elle ne dévoile ce monde que petit à petit. Et il y a au moins un passage émouvant: à la dernière page, avec l'évocation du rituel funèbre chez les éléphants.
Surtout, le lecteur est très déstabilisé quand il comprend, au fil de l'épisode "dans les forêts", que tout est truqué, qu'il n'y a pas de refuge, et que la narratrice elle-même en vient à douter de son identité: ne serait-elle pas elle aussi un être à demi-artificiel, elle aussi juste un réservoir d'organes pour les ultra riches qui gouvernent le monde?
  
 

Le 6 septembre

Il y a eu beaucoup de désistements de dernière minute pour ce RV, résultat: nous étions six. Petite compagnie choisie et discussion sympathique.

Romain Gary, mort en 1980, revient à la mode. "La Promesse de l'aube" n'a jamais cessé d'être lue, mais "Les Racines du ciel", prix Goncourt et bestseller en 1956 n'est pas son roman le plus fréquenté de nos jours.
Pourtant il est très actuel, le style est journalistique au bon sens du mot (style américain, va droit au but, humour) et le massacre des éléphants n'a pas cessé : "hécatombe vertigineuse des éléphants d'Afrique", écrit Le Monde le 22 août 2017 qui consacre une page entière à l'assassinat d'un "Morel" d'aujourd'hui, Wayne Lotter, né en 1965 et assassiné dans un taxi à Dar es-Salam en Tanzanie le 16 août dernier. Cet homme a réussi à monter une organisation de lutte contre les trafics d'animaux qui a permis de démanteler des mafias et de mettre sous les verrous plus de mille braconniers.

A l'époque, le roman de Gary était novateur par son sujet et en plus c'est un beau roman choral, humaniste, qui démonte de façon concrète et lisible les mécanismes économiques et politiques les plus cyniques. Il y a une belle figure de femme, Minna. Il y a, en filigrane, le thème des camps nazis, dont l'ombre tragique se répercute sur le traitement des animaux.
Surtout, ce que Gary réussit particulièrement bien, c'est l'atmosphère. On est immergé dans la colonie des années 1950 (dont Gary voit déjà la fin, il est souvent prophétique comme le sont les romanciers et les artistes).
Il sait aussi rendre les relations entre hommes, les amitiés viriles... cela vient de sa propre expérience, de son engagement dans la France libre. Lui qui n'est pas Français de naissance (né à Vilnius en 1914, arrivé à Nice en 1928, naturalisé en 1935, d'ascendance juive, avec un mélange russe, lithuanien et polonais), il montre dans ce roman son haut degré d'assimilation, sans perdre l'acuité d'un regard critique.
Certains ont pu être rebutés par les premières pages, avec la mise en place au début d'un système narratif compliqué, un peu faulknérien, puis par la longueur du roman imprimé serré, enfin par la cruauté de certaines scènes... Mais d'autres lecteurs et lectrices ont été pris par le livre et enthousiasmés.
Evidemment, il faut contextualiser le livre de Gary: le point de vue est essentiellement "blanc", presque tous les personnages principaux sont des Blancs, alors qu'on est au Tchad. Mais ce n'est pas un livre de nostalgie coloniale, loin de là.

Le 20 juin 2017

 

Malgré quelques absents / absentes excusés et regrettés, nous étions quinze hier, chez Marie-Paule et Michèle, dans un des plus beaux paysages du Morvan.

Est-ce la fatigue de la chaleur... l'énergie manquait pour bien défendre le court récit d'Andreï Makine, "La musique d'une vie", paru en 2001. C'est pourtant un beau récit qui évoque (de façon fluide, sans insister trop lourdement sur les horreurs) l'atmosphère en URSS entre environ 1937 et 1945, avec en plus une plongée dans un moment indéterminé quelque part dans les années 1980. Le livre est construit classiquement sur une rencontre et sur un récit en flash back. On ne peut que vibrer à cette vie du musicien Alexeï Berg (le nom allemand suggère que sa famille est juive, raison de plus pour être persécuté sous Staline), un pianiste sans piano, obligé de prendre une fausse identité et de cacher qu'il est musicien s'il veut survivre, sauvé plusieurs fois de la mort par une succession de hasards... et qui finalement, dans un sursaut de révolte, joue sur un piano en le payant de sa liberté. "Il n'avait pas l'impression de jouer. Il avançait à travers une nuit, respirait sa transparence fragile faite d'infinies facettes de glace, de feuilles, de vent."
Au cours de la discussion, des rapprochements ont été faits avec deux films, "Le Pianiste" de Polanski (sorti la même année que ce livre) et "La vie des autres" - Allemagne nazie, RDA et Russie de Staline, même combat.

Plusieurs livres ont été évoqués hier soir, j'en cite un, pour les lecteurs qui les aiment épais: Charles King, "Minuit au Pera Palace", Payot 2016, 454 p., 25 euros, qui retrace les mutations de la Turquie entre 1900 et 1950 à travers l'histoire d'un hôtel culte.

Lundi 24 avril 2017

Ce livre de Sylvie Granotier, "Personne n'en saura rien", promettait une vraie discussion. Un roman policier parle nécessairement de crimes. Après, il y a des crimes qu'on n'aime pas voir racontés, ici ce sont des viols de jeunes filles par un tueur sériel. Moi-même, j'ai eu le plus grand mal à dépasser les trente premières pages et à vraiment entrer dans le roman. Pourtant, il faut reconnaître que l'auteure ne donne pas dans le voyeurisme, ce qui se passe est suggéré mais pas vraiment représenté.

Mais une fois qu'on a compris que le suspense se transfère sur la jeune fille au caractère bien trempé, Isabelle, la seule qui n'a pas été assassinée, et aussi qu'il y a un dispositif narratif habile, un vrai mécanisme d'horlogerie, avec des chapitres alternés, au début on a plusieurs des crimes, commis à des dates diverses généralement au bord de la mer, mais très vite on a des audiences du procès du violeur, et aussi des chapitres consacrés à l'histoire personnelle d'Isabelle, avec vers la fin la résurgence des premiers crimes grâce à un retour sur les familles des disparues... et un zoom de plus en plus précis porte sur le secret entre Isabelle et Jean Chardin et sur la relation de pouvoir inversée - bref, quand on a compris tout cela, on devient de plus en plus intéressé. L'auteure tombe dans la vulgarité de langage parfois, parce qu'elle essaie de coller aux ados ou au milieu des gens simples. Mais elle a beaucoup de finesse psychologique et son "tableau de la France" est assez juste.

Donc discussion il y a eu, et certaines lectrices n'ont pas vraiment été convaincues, tandis que d'autres ont soutenu le livre. On a parlé du sexe dans la littérature, de la violence au cinéma, du thème longtemps tabou du viol, des faits divers que les romanciers utilisent depuis le 19e siècle.

   
Vendredi 17 mars 
Nous étions onze hier soir (plusieurs s'étaient excusés ou étaient en voyage) et nous avons passé une soirée agréable autour du livre d'Elena Ferrante, "L'amie prodigieuse". Il paraît qu'en italien, dans le titre, elle (Lila) est "géniale".

Le charme a opéré sur beaucoup de lectrices (la soirée était féminine...), parmi les absents Paul et Françoise eux aussi ont dit avoir aimé le livre. Paul a lu les trois volumes. Parmi les présents, plusieurs ont déjà lu le second, et d'autres s'y apprêtent. Bref, "L'amie prodigieuse" interroge aussi sur le phénomène du "bestseller". Les réactions négatives ou mitigées, dans notre groupe, étaient rares.
Le milieu - ce quartier populaire à la périphérie de Naples -, l'époque - l'Italie des années 50 et 60 dans le premier volume -, la psychologie - cette emprise réciproque des deux petites filles qui fonctionnent comme des vases communicants, qui vivent par procuration chacune la vie de l'autre -, tout cela passionne les lecteurs et lectrices. Même l'extrême lenteur et minutie du récit de ces vies racontées au jour le jour ne rebute pas. La violence des relations, qu'il s'agisse des rapports hommes-femmes ou parents-enfants ou des hommes entre eux, ou encore la présence de la maffia (gangrène sociale encore embryonnaire dans le premier volume), cela peut gêner, mais c'est récupéré au nom du réalisme documentaire. C'est vrai que le côté documentaire rappelle des souvenirs: on a eu une longue discussion sur l'école primaire en France, parfois très traditionnelle elle aussi jusque récemment.
Moi j'avais comme objection que dans ce roman le réalisme justement ne concerne que la psychologie et les actions, et qu'il n'y a pratiquement aucune description, aucune évocation sensorielle des ambiances. Il semble que les lecteurs et lectrices y suppléent par l'imagination, ils arrivent à "voir" mentalement les lieux, grâce peut-être au cinéma italien de ces années-là, qui accompagne silencieusement la lecture du roman. La romancière est très économe - la simple mention d'une Fiat "Millecento" suffit pour évoquer tout un monde.
On a tous été d'accord pour dire que quelque chose nous manquera toujours: pouvoir apprécier le style, la langue. Non seulement parce que le roman est traduit, mais parce que le dialecte napolitain est le vrai "fond sonore" des échanges dialogués - est-ce que cela apparaît mieux dans la version originale? Il faudrait aller voir. En tout cas, la narratrice éprouve plusieurs fois le besoin de dire: "je lui ai répondu en italien".
   
 Lundi 13 février 2017
Nous étions hier chez Jacqueline, onze en tout -
C'était pour parler de ce classique de l'humour anglais: Jerome K. Jerome, "Trois hommes dans un bateau". On navigue sur la Tamise dans les années 1880. Il y a des gags à chaque page.

La plupart ont bien aimé, mais sans doute faut-il avoir lu ce livre dans l'enfance, ce qui est le cas de Jeanne et de Paul, lesquels ont retrouvé intacte leur capacité à rire au fil des pages, qui sont parfois des morceaux d'anthologie.

On a discuté de la société victorienne, des auteurs contemporains de Jerome, comme Henry James ou E. M. Forster, des points communs entre "Trois hommes", les nouvelles de Maupassant et les peintres impressionnistes... On a parlé des livres dont le thème est la rivière.
Une perle: un Anglais en 1866 a fait un voyage-exploration sur l'Arroux! C'est Philip Gilbert Hamerton, je l'ai commandé en anglais, en français le livre est cher, mais il y en a un exemplaire à la Bibliothèque municipale d'Autun.
Titre: La rivière inconnue (The Unknown River).

Je recommande aussi un autre classique de la littérature anglaise qui conjugue humour et rivière, c'est un chef-d'oeuvre: Kenneth Grahame, Le vent dans les saules (The Wind in the Willows), ce sont les aventures de Taupe, Rat, Blaireau et Crapaud, il date de 1908, et il existe en français en poche.
 
Nous étions treize hier soir chez Nicole Neyrat et la réunion (rien que des filles) a été très joyeuse, on a beaucoup ri, malgré le fait que le roman d'Anne Brobbel Dorsman soit assez sombre, excepté la première partie "Retrouvailles" et l'Epilogue.
 
C'est parce que les avis sur ce livre étaient très contrastés, cela nous a amusées. Une participante avait lâché la lecture en chemin, une ou deux avaient lu le roman en diagonale, une l'avait lu jusqu'au bout mais était choquée par des précisions sexuelles qu'elle trouve "commerciales", plusieurs trouvaient que la mise en forme n'est pas très bonne... Le style est souvent trop précieux, la romancière adore les jeux de mots.

Pour ma part, ce qui m'a le plus gênée, c'est la version "française" des cahiers rédigés par la jeune fille allemande nazie. Car il manque une explication qui rende vraisemblable notre lecture en français de ces textes, et les mots français, les tournures utilisées ne correspondent pas à la manière dont une adolescente à la campagne pouvait s'exprimer, en allemand, dans les années 1940. Cela sonne faux, ce ne sont pas des textes "traduits", ce sont des textes composés directement dans le français des années 2000. Le sujet du roman, une histoire d'amour avec l'ennemi, est assez banal. On a évoqué des films ou d'autres romans, on a re-raconté des éléments de l'histoire de l'Occupation ou de l'après-guerre... Pour reprendre encore une fois ce sujet aujourd'hui et le renouveler, il faut être convaincant.

Mais - car il y a un mais - "L'ivre coeur" a eu deux défenseures très sincères et ferventes. Ce roman les a touchées, leur a paru réaliste, bien écrit et bien conçu. Plusieurs dans le groupe ont aimé le personnage de la petite fille délurée, qui fait le charme de la première partie. Cette première partie d'ailleurs forme une sorte de texte autonome et elle pourrait faire une bonne nouvelle. Certes, on n'aurait pas la clef du profond désespoir du père/grand-père, mais après tout, le lecteur pourrait accepter qu'il plane une énigme non résolue. En même temps, on a reconnu que la première partie était un prologue indispensable pour introduire en flash back le reste de l'histoire, qui du point de vue de la romancière, constitue sans doute le "coeur" de l'oeuvre.



 

 

 

 

 

 

 

 


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